Le 22 juin 1960. Élection de Jean Lesage

28 mars 2013

Le soir de sa victoire du 22 juin 1960, le chef libéral Jean Lesage s’écrie : « C’est plus qu’un changement de gouvernement, c’est un changement de la vie ! ». Ce jour-là, une « équipe du tonnerre » prend le pouvoir dont font partie des personnages marquants comme René Lévesque, Paul Gérin-Lajoie ou Georges-Émile Lapalme. Notre mémoire collective présente cet événement comme un point tournant qui marquerait l’entrée du Québec dans la modernité. Qu’en est-il vraiment? À quoi ressemblait la société québécoise en 1960? Quelles idées Jean Lesage et Antonio Barrette se faisaient-ils du Québec et quels programmes proposaient-ils? Quels sont les thèmes qui vont dominer la campagne électorale? L’élection des Libéraux était-elle acquise et l’Union nationale dans les câbles? Après les 100 premiers jours du gouvernement Lesage, la vie avait-elle vraiment changé? Voilà quelques-unes des questions auxquelles nous tenterons de répondre.

Date : 28 mars 2013 à 19 h 00
Conférencier : Éric Bédard, historien

À propos d’Éric Bédard

Né en 1969, Éric Bédard est docteur en histoire de l’Université McGill, diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris et professeur à la TÉLUQ, l’école supérieure de formation à distance de l’Université du Québec. Chez Boréal, il a publié en 2011 Recours aux sources. Essais sur notre rapport au passé (Prix Richard-Arès) et en 2009 Les Réformistes. Une génération canadienne-française au milieu du XIXe siècle (Prix Clio-Québec ; Prix de la présidence de l’Assemblée nationale du Québec).

Il vient tout juste de faire paraître, chez First, une Histoire du Québec pour les Nuls. À tous les dimanches, il signe une chronique historique dans le Journal de Montréal et le Journal de Québec. Il est également historien en résidence à l’émission Au tour de l’histoire diffusée sur la chaîne VOX (Vidéotron).

Texte de la conférence

Dans un essai marquant publié en 1978, l’historien François Furet annonçait que la Révolution française était terminée. La formule n’a pas manqué d’étonner puisque cette grande secousse politique et sociale était survenue deux siècles plus tôt. Toutefois, si les événements de la Révolution française n’avaient duré que quelques années, leur sens avait longtemps divisé les Français. Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, la Révolution française avait eu ses partisans inconditionnels et ses adversaires résolus. Partagés en deux camps résolument hostiles, celui des Modernes et des Anciens, les Français n’avaient cessé de se quereller sur son interprétation. Résultat : jusqu’à l’instauration de la Ve République, les régimes s’étaient succédé. De la République sociale de 1848 au régime autoritaire de Vichy, la France avait servi de laboratoire aux expériences politiques les plus saugrenues. Or Furet constatait que, pour le plus grand bien de son pays, cette polarisation s’était enfin éclipsée. Un consensus s’était finalement imposé autour de l’idée républicaine. La démocratie libérale était là pour rester. De plus, il était désormais possible d’étudier la Révolution française de manière dépassionnée, c’est-à-dire de distinguer sa phase positive et libérale de sa phase sanguinaire et totalitaire. Sans passer pour un réactionnaire renfrogné ou un mauvais Français, il était possible de concevoir la Révolution française autrement que comme un bloc, à prendre ou à laisser.

L’élection du 22 juin 1960 marque le début de la Révolution tranquille. Cet événement mythique occupe toujours une place centrale dans la mémoire collective des Québécois et fait périodiquement l’objet de vigoureux débats, d’âpres discussions, de virulentes confrontations sur son sens, ses réalisation, ses ratés.

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